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Lecture(s) ?

Le professeur documentaliste se trouve fréquemment confronté à des stratégies de lecture d’élèves sur le Web jugées insuffisantes par l’École. Même si nous ne pouvons pas agir sur certaines capacités non-acquises doit-on conclure que nous n’avons pas notre place dans ce domaine ? Voyons si certaines notions en information-documentation ont quelque chose à voir avec la lecture.

, par Frédéric Rabat - Format PDF Enregistrer au format PDF

Un quiproquo éducatif

Les élèves en phase de recherche d’informations ont une conception pour le moins « étroite » de ce qui leur est demandé à cette occasion (Les professeurs documentalistes de lycée peuvent le constater périodiquement). Les élèves ne conservent de l’activité de recherche que sa dimension efficace c’est-à-dire : trouvez des informations sur... ! Il est vrai que c’est souvent de cette manière que nous, enseignants, formulons nos consignes.

Nos déceptions face aux résultats et les incompréhensions qu’elles génèrent chez les élèves nous amènent à penser que nous sommes en présence d’un quiproquo éducatif. Il est patent que nos attentes enseignantes ne sont pas celles des élèves en la matière. Nous regrettons en particulier qu’ils ne soient pas suffisamment attentifs aux critères qui permettent de mesurer la valeur et la portée d’un discours à caractère informatif ou argumentatif (laissons momentanément à part le domaine littéraire). Dans le même ordre d’idée il semblerait que les élèves ne soient pas soucieux des effets de hiérarchie au sein d’une publication et a fortiori au sein d’une argumentation. Ils négligent également toute plus-value qu’apporte la dimension référentielle d’une citation ou d’une note.

Cette situation problématique existe depuis que le document a pris une place importante au sein des enseignements. Elle est aujourd’hui beaucoup plus visible parce qu’avec le Web le statut de la ressource a évolué : au gisement local didactisé classique (fonds du Cdi) s’adjoint un gisement non-didactisé. Un gisement multiforme et fluctuant dans lequel il va falloir piocher. Or sur le Web l’acte de didactisation est transféré (en partie) vers l’élève.
C’est le pendant de la médiation documentaire (et peut-être une de ses richesses) : l’élève est notamment confronté au complexe numérique et machinique. Au lycée notre investissement professionnel doit faire en sorte que l’élève ne soit plus soumis aux impératifs de la machine mais qu’il retrouve un processus d’individuation autonome (cf. la terminologie des travaux d’Ars industrialis [1]).

En effet nos élèves acceptent parfois bien naïvement qu’une série de filtres découpent le réel et son flux temporel à leur place (Ars industrialis parle de « discrétiser le continu »). Cette individuation autonome recoupe en partie cette disposition vigile, ce geste réfléchi que nous attendons de la part des élèves. Nous avons pour habitude de ranger cette exigence dans un ensemble d’attitudes et de savoirs regroupés autour du concept intégrateur d’évaluation de l’information.

Sur cette question les natifs du numérique (digital natives) ne mesurent visiblement pas le saut épistémologique que l’on attend d’eux. Mais nous même, en tant qu’enseignant qu’avons-nous à leur proposer ? Je veux dire : qu’avons-nous à leur soumettre pour que cette dimension de la lecture leur devienne sensible et intelligible ?

Deux points de vue sur la question

Les enseignants de discipline

De manière générale les enseignants (toutes disciplines confondues) attendent de leurs élèves un examen attentif et rigoureux du contenu des documents. Il s’agit évidemment que les élèves accèdent au sens de ce qu’ils lisent. Cette exigence de signification ne se limite d’ailleurs pas aux stricts énoncés, compris comme un ensemble de textes autonome et isolé, mais s’efforce de replacer un discours au sein d’un corpus beaucoup plus vaste ; celui qui est labellisé par la discipline. En Histoire, les discours d’un Jaurès refusant la fatalité de la guerre seront mis en regard avec d’autres propos bellicistes tenus à la même époque mais illustrant d’autres points de vue politiques, etc.

Le souhait d’une prise en compte du contexte illustre ici une conception toute scientifique de l’épiphanie du sens. Dans ce cas de figure l’expérience universitaire atteste qu’on ne comprend bien que ce qu’on peut rapporter à du connu, c’est-à-dire à une richesse extérieure au document, comme par exemple une intertextualité beaucoup plus vaste jugée susceptible de restituer au texte étudié toute sa place au sein d’une évolution, d’une progression, d’une involution, ou encore au sein d’un système de causalités. Les notions envisagées par les disciplines se cristallisent donc autour d’un ensemble de textes qui finit par constituer une culture disciplinaire. On peut donc dire que les disciplines ont le souci du contexte d’énonciation. Selon ce point de vue, les lectures d’élèves en classe porteront souvent sur des corpus clos, la clôture étant assurée par l’enseignant qui aura préalablement sélectionné et validé des contenus et des sources. Dans ce type de situation la caution professorale implicite (mais reconnue et consentie par les élèves) restreint l’examen de la source à un acte d’identification. Les enseignants d’Histoire par exemple demandent en effet volontiers aux élèves « d’identifier les sources des documents ».

Les professeurs documentalistes

Les professeurs documentalistes travaillent rarement sur des ensembles finis de documents. Nous avons en effet d’autres objectifs. De notre point de vue quand les élèves recherchent sur des corpus ouverts (ex. le Web ou la base locale) nous savons qu’ils seront affrontés à des difficultés d’un autre ordre justement parce que la culture de la discipline n’est pas complètement acquise (et en tant que professeur documentaliste il n’est pas de notre ressort de l’enrichir par des contenus, les professeurs s’en chargent). En revanche nous savons qu’il nous incombe de favoriser la construction d’une autre culture qui fasse en sorte que l’information ne soit plus prélevée en dehors de toute vigilance quant au contexte de sa production.

Contexte d’énonciation, contexte de production

Ce que nous appelons « contexte », celui que nous explorons avec les élèves n’est plus strictement historico-scientifique mais plutôt socio-technique. Nous alertons les élèves sur la nécessité d’observer les conditions de production des textes : leurs natures, leurs lieux de publication respectifs et les différentes instances à l’œuvre dans et à la périphérie du texte. Notre visée sera donc transculturelle (au sens ou l’examen de ce contexte excède le domaine clos d’une science particulière : nous examinons plutôt des invariants de production d’énoncés). Notre « d’où ça parle ? » est donc essentiellement trivial et concret. De quel endroit, de quelle localité, par quel vecteur, selon quelles modalités ? Quelle hiérarchisation ? En bref selon quelle obscure médiation ? La prise en compte de ces dimensions nous entraine vers un type de lecture du texte bien particulier, une lecture contrainte qui n’a rien d’intuitif et qui conteste même nos tendances naturelles (pressées et paresseuses, mais je parle assurément pour moi). Ces opérations sont déjà bien complexes pour les adultes avertis, elles deviennent très ambitieuses à aborder avec de jeunes intelligences.

Lecture(s) sur le web, lecture(s) de web

Nos élèves sont des lecteurs du Web, nous le savons. Ils pratiquent une lecture rapide (hâtive ?) qui parcourt le texte numérique à la recherche d’indices. Les plus véloces ont des capacités de lecture assez habiles : ils ne lisent pas les textes mais isolent les zones les plus remarquables et notamment les différents indices et marqueurs qui leurs sont proposés (cf. le cas des images du Web). Ces élèves, par exemple, savent déjà (par habitude) que l’ampleur du texte détermine son emplacement dans un site (dans les marges ou dans le « ventre » d’une page web). Les élèves en classe de seconde savent (?) déjà qu’en matière de presse le titrage (sur-titre, titre, sous-titre, intertitre) compose un ensemble d’indices censés orienter le repérage d’une information, et indique une famille de documents (la Presse, les blogs de journalistes, les blogs personnels, etc.). Attentifs à la disposition des informations, ils estiment même parfois qu’ils n’ont pas besoin d’une lecture linéaire et continue pour trouver une information. Ces élèves donnent l’impression de ne pas lire mais juste de décoder à partir d’un ensemble de signes épars qu’ils perçoivent déjà comme des marqueurs.

Lecture de surface ? ou surface de lecture ?

On parle parfois dans ce cas de « lecture de surface ». L’expression est usuelle mais décrit imparfaitement, me semble-t-il, une réalité (toujours) plus complexe ou plus simple, c’est selon. En effet c’est un truisme de dire que toute lecture passe par une surface. Néanmoins il me paraît un peu réducteur d’associer ce terme de surface à la lecture. Tout d’abord, reconnaissons que, même en imaginant (de manière théorique) une lecture qui ne serait que glissement le long de l’épiderme d’un texte, il y aurait quand même ici autre chose qu’un simple parcours sans profondeur. Il n’est pas possible par exemple de penser la lecture sans prendre en compte le fait qu’elle constitue toujours une tension vers le sens du texte, même lorsque le sens est exténué par une lecture trop pressée. Or le terme de « surface » donne à penser que le lecteur n’accède pas au sens (nécessairement « profond », comme il se doit). On voit là les limites de ces métaphores géographiques. Je préfére quant à moi parler de lecture partielle. Partielle parce que même si la richesse du texte lu n’est pas complétement restituée les élèves sont néanmoins très souvent capables de nous dire « de quoi ça parle » (même maladroitement). Ils nous montrent ici qu’ils possèdent de réelles capacités exploratoires. À la réflexion il n’y a rien de surprenant à en déduire que certains élèves ont développé aujourd’hui (souvent en marge de l’école) certaines compétences de lecture rapide grâce à leur fréquentation du Web.

Je propose donc de ne pas trop nous attarder, au lycée (le collège y trouvera sans doute beaucoup de matière), sur cet aspect de la lecture numérique : la lecture d’exploration ou lecture partielle (sauf pour partir de ses acquis), mais de déplacer notre focale vers ce qui fait problème, en l’occurrence, me semble-t-il, ce que je propose d’appeler la lecture d’étude, en particulier lorsqu’elle est rapportée à cette très particulière surface de lecture qu’on appelle le texte numérique.

Lecture et web

La lecture séquentielle, tabulaire et hyperliée du Web (le texte ouvre toujours vers toujours plus de texte) est une lecture complexe qui, à bien des égards, peut constituer un obstacle vers une saisie plus approfondie et relative des contenus. Elle ne favorise surtout pas une dimension de la lecture qui consiste à associer un texte à l’ensemble plus global que constitue son contexte de publication. La lecture de navigation a donc pour corollaire néfaste le fait que le texte n’est pas assez investi en tant qu’objet d’étude mais en tant que simple zone de repérage, simple contenant sans réelle situation de communication.

Où est le problème ?

Pour que la lecture devienne une lecture d’étude le texte doit d’abord être objectivé. C’est-à-dire qu’il doit être distingué par le sujet qui l’appréhende comme une réalité externe à sa perception et compris comme une entité indépendante porteuse de lois et d’intentions qui lui sont propres. Or, pour objectiver un texte le lecteur doit d’abord passer par une opération de délimitation. Où commence et où s’arrête le texte sur le Web, il est parfois bien délicat de le dire : que faire de la partie masquée de la page-écran, des informations en marge, des bandeaux, des sur-bandeaux, des fenêtres intempestives, des commentaires, des tags, des fils de discussion, etc. Pour que le texte soit pleinement objectivé il faut d’abord le clore, isoler un champ de lecture dans ce continuum numérique, exténuer ce flux et s’y tenir malgré la tentation de naviguer (de dériver ?) qui s’empare souvent de l’internaute. Les lecteurs qui prétendent ne pas aimer la lecture sur écran ne font peut-être finalement qu’évoquer (entre autres difficultés) la fatigue qui résulte de cet effort de clôture, indispensable préalable à une bonne concentration.

La clôture du texte ?

La question que l’on pourrait se poser serait donc : où commencent et finissent les lignes de clôture d’un texte numérique ? Pour les élèves le texte se limite parfois à cette longue partie centrale de la page web qui défile (parfois à toute vitesse !) sous l’action de « l’ascenseur » de la barre de défilement. Pour un lecteur plus expert et averti (et plus patient) le texte ne se réduit pas à cette image du texte. La lecture d’étude doit justement quitter l’image pour favoriser une rencontre. Le texte, d’abord objectivé, doit ensuite être investi par un sujet conscient du processus de connaissance à l’œuvre ici. Voilà défini notre cadre de réflexion : comment faire en sorte de rendre l’élève conscient du processus de connaissance à l’œuvre lorsqu’il doit lire un texte, ou, autrement dit, comment l’élève doit-il recevoir le texte ?

Esthétique de la réception ?

Dans le champ des études littéraire cette question est parfois envisagée sous l’angle des propositions d’un courant critique appelé : esthétique de la réception et illustrée par l’école de Constance. Ces travaux : « (...) définissent le contrat littéraire comme un pacte que l’auteur passe implicitement avec son lecteur — qui se repère à partir d’indices textuels, paratextuels, ou extratextuels — et qui, en marquant l’inscription de l’œuvre dans un genre et, au-delà, dans un champ institutionnel, en oriente la réception. » [2]
Nous pourrions trouver quelques outils de ce côté à condition (pour ne pas oublier notre propos) d’étendre la réflexion au domaine de l’écriture référentielle (et non plus strictement fictionnelle comme c’est le cas pour l’école de Constance). Efforçons nous de savoir si ce postulat est fécond pour la question qui nous occupe ici.

« (le) lecteur (...) se repère à partir d’indices textuels, paratextuels, ou extratextuels... »

La proposition qui précède offre une déclinaison ternaire des indices (textuels, paratextuels, ou extratextuels). Elle propose en fait une typologie des indices à explorer pour rendre explicite le pacte de lecture. La recherche d’indices emprunte donc plusieurs voies pour déterminer la nature du contrat qui nous lie (momentanément, virtuellement) à l’auteur et à l’environnement de publication du texte. Ce cheminement du regard qui parcourt le texte opère également un classement pour déterminer des ensembles ou des familles d’indices qui correspondent à des questionnements différents. Maya Lavault isole quatre types de questionnement et donc de contrats (je me suis permis de les réorganiser et de les compléter en fonction de notre propos) :

1.- Précisions relatives au genre et au statut du texte

« Un contrat de lecture sur le modèle du pacte autobiographique (cf. travaux de Philippe Lejeune), qui fixe (ou non) le genre ou le statut d’un texte et en oriente la réception. »

Le contrat ici est associé à une recherche d’indices qui se porte sur des lieux où les conditions d’appartenance génériques sont explicites : le paratexte (titre, préfaces, nom de l’auteur, etc.) mais aussi des lieux ou elles sont implicites : choix éditoriaux, indices textuels. Nous habituons nos élèves à identifier par exemple les sites de presse, les sites de recherche, les bases de données, etc. Toutes ces ressources s’inscrivent délibérément dans un genre de ressources en acceptant les règles qui régissent leur publication. A contrario, les blogs de presse peuvent s’apparenter à une tentative d’affranchissement de certaines règles journalistiques (pour en créer de nouvelles il est vrai).

2.- Fidélité à des critères prédéfinis

« Un contrat de lecture qui repose sur les lois du discours et prend la forme d’un engagement de lisibilité, de cohérence interne, de fidélité à des critères prédéfinis. »

La recherche d’indices se déplace, elle abandonne le contexte de publication (site, source) pour se porter sur l’œuvre elle-même (indices textuels) et/ou son " dehors " en tant qu’il est lié à l’œuvre (attitudes sociales de l’auteur en tant qu’auteur, de la collectivité auteur, correspondance avec les lecteurs, etc.). Actuellement, par exemple, les sites de presse nous permettent d’accéder à l’ensemble des publications d’un auteur.

3.- Engagement programmatique et éthique

« Un « Contrat d’écriture » qui s’énonce à travers un programme esthétique, un programme référentiel, ou des impératifs d’écriture, ou bien un engagement de nature éthique. »

Ici c’est le texte lui-même que l’on doit examiner : pas seulement comme œuvre mais aussi comme manifeste, comme énoncé théorique (les textes énoncent aussi ce qu’ils prétendent être : par ce que j’écris et ce que je publie, je dis ce que je prétends faire parce que je suis un journaliste, un vulgarisateur, un chercheur, etc.). Dés les premiers mots la rhétorique entre en scène et installe le lecteur dans un système de référence particulier. Les professeurs documentalistes connaissent bien les paragraphes introductifs des articles de presse à la française qui doivent répondre aux fameuses questions de la rhéthorique ancienne (QQQOCP) sous peine de déroger aux codes non-écrits du journalisme consciencieux. Le lecteur est en droit de mesurer l’écart entre un programme d’écriture et sa réalisation effective.

4.- Liberté de « jeu » face au contrat

« Un contrat de lecture mis en jeu par la fiction et qui se décrit en termes de stratégies d’écriture entraînant des stratégies de lecture. Là encore c’est le texte lui-même, et plus précisément la fiction qui prend en compte la dimension contractuelle dans l’écriture même et fictionnalise le « pacte de lecture » ou de relecture ».

Ce qui autorise ici ce jeu avec le pacte lui-même c’est que nous ne sommes pas dans le domaine juridique (même si le vocable de « contrat » lui est emprunté) et chaque contractant est libre de ne pas « jouer le jeu » de ne pas respecter le contrat « à la lettre » - jusqu’à certaines limites tout de même, la limite absolue étant l’abandon de la lecture (rupture absolue du pacte de lecture).

Générique et génétique

Grâce au détail de ces quatre types de contrat se font jour également deux manières d’approcher (contractuellement) un texte : le lecteur peut aborder un énoncé par un examen générique et/ou par un examen génétique du texte. Genres et critères ressortissent au domaine générique et le contrat programmatique renvoie à une lecture génétique. Ces deux modes d’appréciation recoupent également deux dimensions cognitives du processus général de connaissance. Pour accéder à un mode de connaissance complet il faut sans cesse maintenir en tension cette double visée qui objective le texte en fonction de son appartenance à une classe d’objets textuels (genre) et en fonction du respect (ou de l’irrespect) qu’il témoigne à l’égard de principes d’écriture et de publication socialement acceptés (communauté de validation, sociolecte).

Prenons un exemple : dans un premier temps l’environnement du texte que j’ai sous les yeux me dit que ce que je lis est un article de revue numérique à prétention objective et analytique, et dans un second temps le texte lui-même, l’objet textuel (le contenu mais aussi la forme) me renseigne sur les outils (référentiels, rhétoriques, etc.) mis en œuvre pour coïncider avec les hypothèses de départ : les attendus (contractuels) sont respectés (mention explicitement référentielle des faits, des dates, des lieux, mention des sources contradictoires, identification des propos rapportés, distinction explicite des commentaires, etc.).

Quelles sont les situations d’apprentissage que l’on peut imaginer pour rendre explicites ces contrats de lecture ?

On peut par exemple pré-sélectionner une ressource particulière en limitant l’activité de recherche à un site qui présenterait une unité de thème et faire en sorte de favoriser l’émergence de contrats implicites. Néanmoins ce type de séance ne permet pas d’aborder la complexité de la recherche puisque l’incertitude didactique des informations en provenance du web est ici artificiellement gommée. Nous savons qu’il nous faudra tôt ou tard envisager une démarche plus ouverte et plus proche d’une situation de recherche libre.

Avant de lancer les élèves dans la phase de recherche il nous faut une situation éducative capable d’amener la prise de conscience d’une impérative mise en contexte de l’information (en particulier sur le Web). La contrainte d’une demande externe, d’une production finale externe à l’info-documentation (par exemple un dossier documentaire de TPE demandé par le binôme Lettres et Histoire) ne doit pas nous amener à négliger cette démarche d’explicitation.

Les notions

Les professeurs documentalistes ont à leur disposition une notion qui, à bien y regarder, joue sur cette dimension contractuelle de la lecture. Il s’agit de la notion de source d’information. Cette notion est bien théorisée par les sciences de l’information (et par la didactique : je songe notamment au dictionnaire des notions info-documentaires). S’interroger sur l’identité de la source d’information (et son corollaire la fiabilité) c’est bien une autre façon de se demander : quel est le contrat qui me lie à la lecture de ce texte ? Faire en sorte que nos élèves soient convaincus que, derrière cette question, l’enjeu cognitif est capital. Prendre la mesure de cet enjeu c’est donc poser les conditions favorables au déploiement de la série d’opérations décrites ci-dessus et que je rappelle :

 Examen des précisions relatives au genre et au statut du texte (exploration générique)
 vérification de la fidélité à des critères prédéfinis (générique)
 Dévoilement d’un engagement programmatique et éthique (exploration génétique)
 Estimation de l’ampleur du « jeu » face au contrat (générique et génétique)

Avec les élèves...

Sur ce même site je propose un article (co-rédigé avec ma collègue Claire Fontan) décrivant une séance susceptible d’aborder de front certaines des questions soulevées par les réflexions qui précèdent :
 De la page au site. Disponible à l’adresse : http://documentation.spip.ac-rouen.fr/spip.php?article323